Description
Poème autographe signé « Elégies » XI. S.l.n.d. (Paris août 1892) ; 1 page in-8° sur papier de l’assistance publique contrecollé sur onglet.
Beau poème issu du recueil Elégies, où l’on retrouve à l’instar des poèmes saturniens l’éloge de la nature. Verlaine nous conte la vie d’une vague, impétueuse comme les amours, faisant ici référence à sa relation orageuse avec Philomène Boudin. Quelques corrections et ajouts.
« Elégies
XI
Bah ! (Ce n’est pas à vous que l’on parle, madame),
Après tout, laissons-nous promener par la lame,
Elle est douce, elle est forte, elle sent bon la mer,
Son haleine est salée avec un goût amer,
Elle est ronde et nerveuse, elle chante, elle gronde,
Et c’est un véhicule aimable sur le monde,
Sa transparence aussi forme un miroir vivant,
Réfléchissant le ciel et son aspect mouvant,
La brise la caresse et la bise la fouette.
Espoir, regret ou vœu, l’aile de la mouette
Vole autour et, la nuit, grise, est rose le jour.
Comme la certitude ou le doute en amour…
Laissons-nous promener par elle (rien, ma chère,
Qui vous concerne) tant qu’elle est encor légère
Et claire et mesurée en un juste reflux.
N’attendons pas, grands dieux ! qu’il ne soit bientôt plus
Temps, que, sous l’ouragan subit, elle n’éclate
Furieuse et méchante et trouble sous Hécate
Fatidique et moqueuse en les nuages tors :
Telle une femme ayant franchement tous les torts,
Qui se révolte et devient pire que nature,
Orage de colère et tourbillon d’injure !
Ah ! malheur à celui pris dans cet affreux pot
Au noir
(Tiens, ma chère ! Que charmante ce tantôt !)
Paul Verlaine »
Elégies, recueil composé de douze poèmes contant les joies et surtout les tristesses de l’amour, débuté en août 1892 et publié chez l’éditeur Léon Vanier en mai 1893.