Antonin ARTAUD – Lettre autographe signée

Antonin ARTAUD (1896 – 1948), théoricien et acteur de théâtre, écrivain, poète français. Il part une année au Mexique transformé, revient en 1936 à Paris, mais une crise de démence lors d’une conférence le renvoie en centre psychiatrique, il y reçoit des électrochocs pendant 9 ans

Description

Lettre autographe signé à l’écrivain Robert Desnos. Ville-Evrard, 13 novembre 1940, Robert Desnos ; 2 page in-4° sur papier en-tête du café « Le Dôme ». Plie d’usage

Magnifique lettre pleine de désespoir d’Antonin Artaud sous l’emprise de Satan qui demande à son ami Robert Desnos de lui venir en aide : « Vous aussi, vous savez Desnos, depuis lundi que le péché et le mal existent et que c’est eux qui ont produit l’existence dans la douleur et la douleur…et vous savez que ce sont des êtres puisque vous les avez vus et ils sont des milliards de millions qui occupent depuis des éternités les espaces. Et ils sont de chair et d’os. Voilà plus d’un an, ici, que je les ai sur moi, qu’ils me mutilent et empêchent tout soulagements. Mais si tout français vivant, à de rares exceptions près qui sont toutes marquées d’un signe, est un damné il y a de par les rues et dans les maisons, des millions et des millions de morts que le mal a gardés vivants et qui vivaient là accueillis dans le Passé et qui nuit après nuit reviennent car chaque nouveau jour qui reparait et qui s’écoule a été repris par Satan dans le Passé au prix chaque fois, pour moi, d’une nouvelle affre et d’une nouvelle mutilation et cela afin de garder en ce monde ci la présence d’un Mal que passe mes jours à tuer. Je n’en puis plus de cette lutte impie et je dois être soulagé, Robert Desnos. Venez me voir ici le plus tôt possible et faites ce que vous pourrez pour moi. Dites à Youki que je l’ai vue elle aussi se battre contre le mal et que je ne l’ai pas non plus oubliée. Je suis votre affectueusement. Antonin Artaud. Il faut que Tristan Tzara fasse un dernier effort »

Le 8 novembre 1937, le préfet de la Seine-Inférieure déclare Antoine Artaud « dangereux pour l’ordre public et la sûreté des personnes », suit son internement à l’asile psychiatrique des Quatre-Mares. Il lui est administré une camisole de force. En avril 1938, sa mère obtient son transfère au centre psychiatrique de Sainte-Anne où il reste onze mois. En 1939 il est interné à l’hôpital de Ville-Évrard, durant trois ans et onze mois, pour des causes de « Syndrome délirant de structure paranoïde, idées actives de persécution, d’empoisonnement, dédoublement de la personnalité. Excitation psychique par intervalle. Toxicomanie ancienne. ». Les conditions sont précaires, du fait du rationnement, il subit de nombreux électrochocs. Robert Desnos et Paul Eluard interviennent auprès du docteur Ferdière pour qu’il prenne en charge Antonin Artaud dans son hôpital psychiatrique à Rodez. Il y sera admis en 1943. Durant ses internements, il ne cessera d’écrire des lettres.