Juliette DROUET [Victor HUGO] – Lettre autographe

Juliette DROUET (1806 – 1883), actrice française, maitresse de Victor Hugo. Suite au coup d’état de Louis-Napoléon Bonaparte du 2 décembre 1851, elle part en exil avec Victor Hugo et sa famille à Jersey puis Guernesey en 1855. Hugo l’installe dans une demeure en face de la sienne. Elle participe au quotidien du grand homme, recopiant ses manuscrits, comme les Misérables, et ses courriers.

Description

Copie autographe d’une lettre de Victor HUGO adressée à Monsieur Wolters à Amsterdam. Guernesey, Hauteville House, 2 octobre 1861 ; 2 pages in-4°.

Lettre relative au « banc d’Amsterdam », banc « rococo » acheté par Victor Hugo le 7 août 1861 à Wolters, propriétaire de l’hôtel Rondeel à Amsterdam. Il est livré le 16 décembre à Guernesey, puis peint et doré par l’artisan doreur Grigg, pour être installé dans le salon bleu de Hauteville house le 30 mai 1863. Hugo y peindra des fleurs et un blason sur le dossier le 24 mars 1864, où il est toujours en place de nos jours.
Hugo a reçu une lettre des courtiers maritimes de Rotterdam Hudig et Pieters, l’informant que Wolters refuse de livrer le banc. Il proteste de manière véhémente, entendant que si la livraison ne se faisait pas, il devrait modifier son récit en conséquence dû à « l’indélicatesse » de Wolters, ce qui serait fâcheux pour sa réputation : « Je reçois aujourd’hui même à ma résidence de Guernesey une lettre de MM. Hudig et Pieters, courtiers maritimes à Retterdam. J’y lis les quatre lignes que voici : « M. Wolters d’Amsterdam nous écrit qu’il n’a pu exécuter notre ordre, et désire savoir de « qu’elle manière il peut nous rembourser les 11 florins 80 cents qu’il a reçu de vous ». Ce passage est une énigme pour moi. A coup sûr, il ne peut signifier que vous me refusiez la livraison de l’objet que vous m’aviez vendu. Je n’ai pas besoin, Monsieur, de vous rappeler que le prix proposé par moi a été sur le champ, et avec empressement, accepté par vous. Dans tous les pays où la probité commerciale est comptée pour quelque chose, et, je le pense, en Hollande aussi bien qu’ailleurs, il est de règle stricte que l’objet vendu, et dont le vendeur a touché le prix, n’appartient plus au vendeur. L’objet payé par moi à vous, monsieur, est donc à moi et n’est pas à vous. Vous n’avez aucun droit sur cet objet. Ne pas le livrer équivaudrait à le voler. Il est impossible que vous ignoreriez ces vérités élémentaires en matière commerciale avant de croire à un manque de probité qui me peinerait de votre part, c’est à vous-même, Monsieur, que je m’adresse. La petite aventure du banc acheté par moi à l’hôtel Rondel d’Amsterdam tient une place dans le livre que je vais publier prochainement sur mon voyage en Hollande. Elle me semblait pouvoir être racontée tout à votre honneur. Je regretterais d’être forcé, par un dénouement étrange et inattendu, de changer d’opinion et de devoir terminer le récit du fait par la constatation d’un acte d’indélicatesse, fâcheux pour vous et pour votre maison. Mais je suis convaincu que les lignes transcrites par MM. Hudig et Pieters comme écrites à eux par vous, viennent de quelque malentendu, et je ne doute pas que vous ne vous empressiez de me livrer l’objet qui m’appartient. Je vous avais jugé sincère et loyal, votre réponse me prouvera que je ne m’étais pas trompé. Dans l’attente d’une réponse honorable de votre part, je vous offre l’assurance de ma parfaite considération. Victor Hugo. Vous pouvez envoyer le banc immédiatement par le chemin de fer, et dument emballé, à MM. Hudig et Pieters, courtiers maritimes à Rotterdam, en mettant sur le colis le signe que voici : VH 12. Dans le cas où les petits frais d’emballage et de transport dépasseraient la somme (5 francs) que je vous ai remise pour ce service, vous m’informeriez de l’excédent, et je vous ferais rembourser par l’entremise de MM. Hudig et Pieters. Mon adresse est : M. Victor Hugo, à Hauteville House. Guernesey (îles de la Manche) »